Mars est le mois où doit naître l’enfant que je porte et c’est aussi les un an de Colostrum en librairie.
J’ai inscris la date prévue d’accouchement quelque part au milieu de mes organes bousculés, sans y croire vraiment. Je sais que les enfants arrivent bourrasque, au milieu d’un jour qui leur appartient. Prédiction ou non, science ou non, cela reste bien souvent une décision qui leur revient.
Alors, je pense à Colostrum, je pense à l’écriture qui revient toujours galopante dans ces moments où le temps se bouscule et s’estompe. Je pense à ce postpartum retranscrit qui est devenu une forme de tragédie collective. Le bateau ivre de la publication. Des absences de réponses, de la violence, des informations jamais communiquées, apprises par hasard, des surprises, du chantage, un tout qui aboutit à une liquidation judiciaire. C’est un trou béant dans lequel tombe Colostrum, je ne sais plus si j’ai écrit ou non, je suis certaine du gouffre d’illégitimité qui m’appelle. Je renie l’écriture, elle m’appelle. Je suis triste, intriguée et déterminée.
Comme Coline Pierré dont j’ai lu Eloge des fins heureuses en février dernier, je croyais aussi que la douleur était une condition à l’écriture. J’y ai cru en lisant L’Amant de Duras ou La Douleur à l’âge où je devais choisir « un métier sérieux ». Il fallait cesser d’écrire « écrivaine » sur la ligne « profession » sur la demi-feuille du début d’année. C’est probablement là, où j’ai commencé à noter journaliste, juge pour enfants, professeur de français.